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13 mars 2018

Logements et cannabis

Plusieurs propriétaires ont exprimé dans les médias récemment leur inquiétude face à la légalisation du cannabis. En effet, certains propriétaires craignent que le cannabis devienne une nuisance pour leurs autres locataires puisqu’ils savent qu’à titre de locateur propriétaire, ils ont la responsabilité de s’assurer que les locataires ne produisent pas de nuisance dans l’immeuble.

Il faut d’abord savoir qu’au Québec, il est reconnu qu’il est possible d’interdire à un futur locataire de fumer la cigarette dans le logement ou même sur le balcon du logement. Il s’agit d’une condition au bail qui doit apparaître clairement dans le contrat, i.e. le formulaire de bail obligatoire prescrit par la Régie du logement. Il en serait de même donc pour le cannabis.

Ainsi, lors du renouvellement d’un bail, en respectant les délais prévus par le Code civil du Québec, il est possible pour un locateur de modifier certaines conditions. Qu’en est-il lorsqu’un logement a été loué avec la possibilité de fumer dans celui-ci et que le locateur veut changer cette condition ?

D’abord, il faudra se placer au moment de la négociation du bail initial, c’est-à-dire lors de sa conclusion entre l’aspirant locataire et le locateur. Ainsi, si, comme dans notre exemple, il n’y avait aucune considération ou mention sur la possibilité de fumer la cigarette et que, par une demande de modification en bonne et due forme, le locateur veut interdire la consommation de cannabis, il se pourrait fortement que la demande ne respecte pas les critères.

En effet, pour être acceptée, une demande de modification de bail, en plus de respecter les délais de dénonciation au locataire, doit permettre le droit au maintien dans les lieux du locataire, condition essentielle à tout bail. En effet, il existe au Québec un droit à demeurer dans son logement. Par conséquent, un bail qui permettrait de fumer la cigarette et qui serait modifié au cours du temps pour empêcher de fumer du cannabis pourrait demeurer inchangé, malgré la demande du propriétaire.

Puisque le fait de fumer dans le logement pourrait être considéré comme étant une condition de maintien dans les lieux, i.e. que la personne qui se verrait interdire de fumer dans le logement risque de devoir quitter le logement puisqu’il serait déraisonnable de lui demander de cesser, il n’y aurait pas lieu de modifier le bail.

Autrement dit, si vous avez négocié un bail qui vous permet de fumer la cigarette, ou encore qu’il ne vous a jamais été interdit de le faire et que vous profitez de ce droit, il serait difficile pour un locateur de faire avaler à la Régie du logement que sa demande de modification pour interdire cette activité soit justifiée. La preuve à fournir devra démontrer que le locataire sera forcé de déménager à la suite de cette modification. Si la preuve démontre que ce sera effectivement le cas, alors la demande en modification sera rejetée.

La Régie du logement a par ailleurs été très réticente à ajouter une clause d’interdiction de fumer en cours de bail. En effet, il est souvent considéré que cela risquerait de forcer le déménagement du locataire, ce qui est interdit.

Enfin, il faut rappeler que malgré cette possibilité au droit au maintien dans les lieux et au peu de chance qu’un bail soit modifié s’il permettait au départ le droit de fumer la cigarette, il n’en demeure pas moins que les locataires sont tenus au respect d’obligations, notamment celle d’éviter les nuisances. Ainsi, si l’odeur de la fumée de cannabis devait incommoder les autres locataires et qu’ils devaient s’en plaindre, le locataire qui consomme du cannabis pourrait se voir sanctionner. Soulignons en dernier que le cannabis sera assimilé à la cigarette en vertu du projet de loi sur le cannabis du gouvernement du Québec et qu’il est donc souvent plus prudent pour un locateur de prévoir dans son bail une interdiction de fumer la cigarette et, aussi, le cannabis.



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